Ce monde est fou en ce moment pour Christine Citti. L’ancienne héroïne des enquêtes d’Éloïse Rome tourne dans un téléfilm pour France 2 depuis le début de la semaine. Députée, un jour, fleuriste, l’autre, cette rigolote sur les plateaux de tournage, transmet toujours une émotion juste dans sa placidité ou son exubérance.
Un minois plus qu’un nom…
Les enquêtes d’Éloïse Rome
La pétulante blonde fait une percée dans le cœur des téléspectateurs avec Les enquêtes d’Éloïse Rome (2001-2005), où elle revêt le costume d’une sagace capitaine de police que Jean-Baptiste Martin, en jeune lieutenant, a parfois du mal à suivre dans ses élucubrations. « Elle a un côté « Robocop » au boulot, et un côté « Martine fait des châteaux à la plage » dans sa vie privée », décrivait Christine Citti au journal L’Humanité, en 2000. Après quatre saisons de bons et loyaux services, l’accro aux chouquettes vogue vers de nouveaux horizons. La traversée fut relativement longue avant que son minois ne réapparaisse sur le petit écran.
Juliette et sa Drôle de famille
Amincie et brune, Christine Citti renoue avec les rôles réguliers avec la saga Le réveillon des bonnes (2007). En décembre 1918, la fantasque devient l’insoumise, Marie. Alors que les quatre bonnes d’un immeuble bourgeois s’affairent aux préparatifs du réveillon de Noël, Marie se met en grève. « C’est une petite rebelle, à bout. Elle porte la mort de son mari et ses enfants sur ses épaules. Elle est déterminée mais n’a pas de conscience politique », dépeignait Christine Citti dans un entretien au Figaro, en 2007. Celle qui a découvert le bouddhisme après un énorme chagrin d’amour se lance dans une nouvelle aventure en 2009. Retour à l’époque contemporaine avec Juliette, sa Drôle de famille et de nouveaux problèmes du quotidien : Trois célibataires avec enfants, accablés par le désastreux constat de leur vie et par les soucis financiers, décident de vivre en collocation.
Clash
La cougar de cette fiction vient d’achever le tournage du quatrième volet de la série à Marrakech, après celui de Clash (2012), une série sur les relations entre les adolescents et leur parents. La mère de Marion, Joséphine et Ferdinand y interprète celle de Dylan, un garçon sensible et rêveur et Kelly, en conflit perpétuel avec elle. Cette employée dans une boutique de lingerie, criblée de dettes et souffrant de solitude, sourit à la vie. « Elle est dans le déni. Elle est comme Strauss Kahn », plaisantait la blonde – perruquée cette fois – pulpeuse sur le tournage.
Un manque…
La comédienne brûlera les planches au côté de Jacques Weber dans Le prix Martin, en 2013, elle retrouvera les loges du théâtre de l’Odéon, qui furent les siennes en 1987, lorsqu’elle jouait dans La ronde d’Arthur Schnitzler. Comme un premier amour qui ne s’oublie pas, elle a eu ses premiers émois de comédienne au théâtre et retombe régulièrement dans ses bras. Son dernier flirt avec la scène c’était toutefois lors d’un vaudeville, Les fiancés de Loches (2009) de Georges Feydeau, dans une adaptation très moderne et haute en couleur.
Tout a commencé par une tendre passion avec Anton Tchekhov. L’un des meilleur souvenir de la comédienne d’une jeune fille qui a décliné le sentiment amoureux au travers de trois pièces du dramaturge russe. L’amour est sans retour dans Les trois sœurs (1988), mis en scène par Maurice Benichou, au festival d’Avignon, où la benjamine Irina sacrifie ses illusions et se résout à épouser un homme par dépit. L’amour est salvateur pour la jeune Sacha désireuse d’ extirper Didier Sandre de sa mélancolie dans Ivanov (1988), sous la direction de Pierre Romans, au théâtre des Amandiers-Nanterre, puis sous celle d’Arnaud Sélignac en 1990, pour l’adaptation télévisuelle. Enfin, l’amour est simulé et utile pour Nina, qui se rapproche d’un Michael Lonsdale qui pourrait lui servir dans sa future carrière dans La Mouette (1993), mis en scène par Michel Fagadau, au théâtre de Boulogne-Billancourt.
Le petit écran éloigne un temps Christine Citti des représentations. Ce petit bout de femme y incarne une Aurore Dupin de 26 ans qui s’ennuyant à Nohant auprès de son mari, va devenir George Sand, une femme libre (1994). La comédienne accepte ensuite de prendre du poids pour interpréter Sophie, une cuisinière complexée par ses rondeurs surtout depuis qu’elle a appris que son mari l’avait trompé avec une fille filiforme dans Une grosse bouchée d’amour (1998). La jeune femme au regard intense a longtemps affirmé qu’elle se sentait bien dans son corps tout en endossant les traits de personnages mal dans le leur ou raillées, à l’instar de Rosalie. Cette pompiste planifie son départ du domicile familial en raison des reproches incessants de sa belle-mère au sujet de ses kilos superflus, dans Rosalie s’en va (2005).
Une habituée des seconds rôles…
Christine Citti personnifie souvent « l’épaule pour pleurer » de Jeanette, l’amie et indéfectible soutien de Marie Trintignant, dans Victoire ou la douleur des femmes (2000), à Muriel, la confidente de Natacha Amal, dans Mes deux maris (2005), en passant par Didou, la copine de Catherine Jacob, qui l’assiste dans sa reconversion de chauffeur de taxi en auteur de bestseller, dans La double vie de Jeanne (2000).
« J’ai beaucoup joué les meilleures amies, les femmes trompées, les ex-femmes… Je n’avais jamais incarné au cinéma l’être aimé. Là, avec Suzanne, Viviane Candas m’a redonné une sorte de légitimité, cela ne pouvait pas tomber mieux dans ma vie », confiait la comédienne dans les colonnes de Libération, en 2007. Cette fille de pieds-noirs née en France, à l’automne 1962, ses parents tout juste rapatriés d’Algérie incarne Suzanne, une grecque discrète, sensuelle et pudique qui va faire chavirer le cœur de l’ancien professeur de lettre classique qu’est Patrick Bauchau, abattu par le deuil de sa femme et la réouverture d’une profonde blessure liée à la guerre d’Algérie. Elle n’est pas de son monde, ni de son âge, mais sera son dernier amour. Le film a été accueilli dans l’intimité de quelques salles, avec une critique mitigée sur le traitement du sujet pourtant unanime sur le jeu impeccable de la comédienne.
Dans sa quête de légitimité, cette femme aux multiples facettes est passée devant la caméra de Claude et Nathan Miller, dans Je suis heureux que ma mère soit vivante (2008) et de Claude Lelouch, dans Ces amours-là (2010). Mère adoptive d’un adolescent qui traque, sans relâche, sa mère biologique, dans l’un, empoisonneuse, dans l’autre.
De l’ombre à la lumière…
Camping 2
« C’est vrai, j’ai fait pas mal de choses avant Éloïse Rome, dont le public ne se doute même pas. Mais je n’ai jamais cherché à être connue », confessait Christine Citti au journal Le Parisien, en 2002. (Re)connue depuis le succès de la série policière de France 2, les spectateurs l’ont redécouvert après sa métamorphose. La plantureuse blonde jouissait d’une certaine notoriété, par le biais du petit écran, la svelte brune crève le grand – dans un rôle secondaire – sous la direction de Fabien Onteniente. La comédienne n’a rien perdu de son regard de braise et des son sourire malicieux lorsqu’elle devient Madame Chatel, la directrice du camping les Flots Bleus dans Camping (2006), puis dans Camping 2 (2010).
Quand j’étais chanteur
En parallèle du succès au box office, une satisfaction personnelle, avec la sortie en salles de Quand j’étais chanteur. Christine Citti y incarne l’ex femme de Gérard Depardieu. « C’était un de mes rêves d’enfant », racontait la comédienne au Télégramme, en 2009. Outre la rencontre artistique avec Gégé, le film en sélection officielle au festival de Cannes, lui vaut sa première nomination aux Césars.
Cette année charnière a également été placée sous le signe des retrouvailles avec le théâtre et un acteur. En 1999, Christine Citti jouait dans Flip ! au théâtre Fontaine et quittait la série P.J. dans laquelle elle interprétait l’épouse d’un lieutenant de police. Sept ans plus tard, elle renoue avec les planches, dans Mademoiselle Julie où elle rejoint Bruno Wolkowitch, qui vient à son tour de quitter le commissariat de Saint-Martin.
Une vocation familiale…
Un divorce de chien
Nés d’un père physicien et d’une mère professeur de physique, Christine et Marc Citti, son frère cadet, se découvrent une vocation commune. Ils seront comédiens. Élèves de Patrice Chéreau au théâtre des Amandiers, leurs parcours s’entrecroisent le temps de quelques tournages. Pour leur premier tandem sur le petit écran, dans Le fou de la tour (1996), ils refondent leur relation fraternelle : lui, en psychopathe en cavale et elle, en sœur protectrice. La même année, ils foulent ensemble la scène du théâtre de la Colline, aux côtés d’anciens sociétaires de la maison de Molière : Michel Aumont et Catherine Hiegel, dans Arloc. Après douze ans de séparation artistique, frère et sœur partagent l’affiche avec Laetitia Casta dans Née en 68 (2008). Plus récemment, ils étaient les deux célibataires du groupe d’amis dans les tumultes d’Un divorce de chien (2010).
Comme un mauvais souvenir
Marion Harlez-Citti, 25 ans, a reçu la passion des planches en héritage et embrasse une carrière de comédienne, comme maman. Mère et fille se sont déjà croisées sur le tournage de Comme un mauvais souvenir (2009). Christine Citti y menait à nouveau l’enquête sur le petit écran, dans la peau d’une avocate tandis que sa fille faisait une brève apparition.
Lorsque Christine Citti réalise son premier – et unique pour le moment – long métrage, Rupture(s), en 1993, elle offre un rôle à Marc et Marion, alors âgée de 6 ans. Pour son héroïne, elle opte pour son amie Emmanuelle Béart. « Pendant des années notre amitié a été fusionnelle. Emmanuelle est la marraine de ma fille, et je suis la marraine de son fils, révélait la comédienne dans Ciné Télé Revue, en 2003. Je connais ses histoire, elle connaît les miennes. Ce n’est pas du tout une amitié d’actrices. » Pour compléter le groupe d’amis qui se remet en question à la suite du suicide de l’une d’entre eux : Michel Piccoli et Anouk Aimée, ses partenaires dans L’amour maudit de Leisenbohg (1991). Christine Citti évoque parfois un retour derrière la caméra, affaire à suivre…
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